mardi 25 juillet 2017

Prochain blog

 La parution du prochain blog est prévue pour le 20 août. 

 Le titre retenu est :

         La souffrance d'un homme seul

A bientôt 

vendredi 21 juillet 2017

Fête de l'Assomption 15 août

Les entretiens du dimanche
35

L'Assomption

Le 15 août de chaque année, l'Église catholique célèbre la fête de l'Assomption, en l'honneur de la Vierge Marie, mère de Jésus le Christ. En l'absence de Théophile, nous allons tenter d'esquisser les raisons qui justifient cette fête très importante pour l'Église catholique.

Tout d'abord, que signifie le mot "assomption"? Assomption est un mot qui vient du latin adsumere qui veut dire "prendre avec soi". Cela ne nous avance guère pour expliquer le sens de la fête chrétienne. Quoique …. mais n'anticipons pas.

Marie tient une place importante dans la vie des chrétiens; reportons-nous par exemple au texte écrit par Théophile sur le Rosaire. C'est elle qui a donné naissance à Jésus, reconnu Fils de Dieu, venu en notre monde pour sauver les hommes de la mort et leur montrer le chemin qui mène à Dieu vers la vie éternelle. C'est elle qui sera la mère douloureuse au pied de la croix, assistant avec très peu de fidèles à l'agonie de son fils, condamné à mort à l'issue d'un procès inique. Mais c'est elle aussi qui sera présente avec les disciples pour prier son fils quand il sera parti rejoindre le Père. Là, s'arrête ce que l'on sait avec assez de précision. L'apôtre Jean la prit avec lui comme Jésus agonisant le lui avait recommandé:
"Jésus, voyant sa mère, et près d'elle le disciple qu'il aimait, dit à sa mère : “Femme, voici ton fils. ” Puis il dit au disciple : “ Voici ta mère. ” Et à partir de cette heure-là, le disciple la prit chez lui. (Jn 19, 26-27)

Les premiers siècles de l'Église chrétienne furent consacrés à préciser le contenu de la foi. Parallèlement, avec plus de simplicité, mais avec beaucoup de cœur, les chrétiens  firent une place de choix à Marie. 
Très tôt, les chrétiens orientaux ne purent supporter l'idée que Marie, mère du Christ, était morte comme tous les êtres humains. Ils sentaient que le Christ avait réservé une tout autre issue à la vie de sa mère. Pour eux, si Marie a été préservée de la mort spirituelle du péché, elle devait être préservée de la corruption du tombeau.
En 373 ap. J-C., un diacre syrien et théologien dans la région de l'Assyrie, saint Ephrem, évoque le concept selon lequel le corps de Marie serait resté, après son décès, intact, non atteint par l'impureté de la mort, au sens de la Torah juive.
Au 4e siècle, un évêque et théologien chrétien, Épiphane de Salamine, envisage plusieurs hypothèses sur ce qu'il est advenu de Marie à la fin de sa vie. Il conclut qu'on ne peut pas se prononcer sur ce point.
En Occident, à la fin du 6e siècle, Grégoire de Tours, évêque de Tours, historien de l'Église,  est le premier à faire mention de l'Assomption. Il s'appuie sur un corpus de textes apocryphes, appelés collectivement le Transitus Mariæ. Selon la tradition qui en résulte, Marie rencontre sur le Mont des Oliviers un ange qui lui remet une palme de l'arbre de vie et lui annonce sa mort prochaine. Marie rentre chez elle et fait part de la nouvelle à son entourage. Mystérieusement avertis, les apôtres viennent des différents endroits où ils sont partis prêcher, afin d'entourer Marie. Jésus apparaît entouré d'anges pour recevoir l'âme de sa mère, qu'il confie à l'archange Michel. Les apôtres enterrent le corps au pied du Mont des Oliviers. Quelques jours plus tard, Jésus apparaît de nouveau et emporte le corps au Paradis, où l'âme et le corps de Marie sont réunis.
Notons au passage que la venue des apôtres pour entourer Marie a sans doute inspiré une peinture qui se trouve dans l'église Saint-Michel de Dijon. Malheureusement, je n'ai pas d'illustration valable à proposer (peinture très sombre et difficile à photographier). Cette œuvre, qui a été restaurée, est une peinture murale qui représente “ La mort de la Vierge ” par Nicolas de Hoey, peintre de la ville de Dijon (1581). La Sainte Trinité, Dieu le Père, avec son Fils, et l'Esprit Saint représenté sous la forme d'une colombe, veille sur la Vierge. Le musée d'art sacré‚ de Dijon nous a fait parvenir le texte d'une communication faite par E. Fyot devant l'Académie de Dijon entre 1927 & 1931. En voici un extrait:
“ Cette peinture, haute de 5,70 m, large de 1,90 m, est exécutée à l'huile sur un enduit solide, de plâtre ou de bourre, qui ne s'est pas effrité. Malheureusement les ombres ont poussé au noir, sans doute par une réaction de l'enduit sur les produits colorés sous l'action des agents atmosphériques. A cause de son élévation et du manque de recul, ainsi que de l'éclairage défavorable, cette peinture n'est pas facile à regarder. Elle se divise horizontalement en deux parties.
1- Dans la zone inférieure et la plus importante, la Vierge mourante est couchée, les mains jointes, et comme en extase dans un grand lit central à baldaquin placé au fond du cénacle, qui est carrelé de blanc et de rouge. Autour du lit, sont disposés les Apôtres et les disciples, avertis du moment suprême, dit la Tradition, par une révélation divine. Ils sont vêtus à l'antique, mais l'un d'eux, assis au chevet de la mourante, en face d'un livre ouvert, porte une sorte de costume sacerdotal. Il parle avec véhémence à Marie, moins pour l'assister à ses derniers moments que pour lui demander de protéger encore du haut du ciel ceux qu'elle va quitter… Un second Apôtre présente à la Vierge un flambeau allumé, un autre au fond et à droite tient une croix processionnelle, tandis qu'en avant du lit se voit, par terre, un bénitier portatif muni de son goupillon; tous accessoires funèbres qu'on retrouve dans certaines dormitions de l'époque. À gauche, saint Jean paraît consigner, dans un livre ouvert sur son genou, les dernières paroles de Marie. Sur le même plan, à droite, un Apôtre, probablement saint Paul, arrivé après les autres, toujours selon la Tradition, se dirige vers Marie pour répondre à son appel. 
2- La partie supérieure de l'oeuvre représente la Sainte Trinité prête à recevoir au ciel la Vierge Marie. On y distingue le Père et le Fils, assis sur le même siège. L'Esprit est figuré par une colombe. ”
D'autres récits vont suivre. Citons la tradition de l'Église de Jérusalem à ce sujet : Juvénal, évêque de Jérusalem, se voit demander lors du concile d Chalcédoine, le corps de Marie par l'empereur Marcien et son épouse. Juvénal répond que Marie est morte entourée de tous les apôtres, sauf Thomas, qui est en retard. À son arrivée, quelques jours plus tard, Thomas demande à voir la tombe, mais celle-ci s'avère vide ; les apôtres en déduisent alors que Marie a été emportée au ciel.
Une autre tradition rapporte que l'Assomption eut lieu à Éphèse, dans la maison connue aujourd'hui comme la « Maison de la Vierge Marie ». Marie y a accompagné l'apôtre Jean, à qui le Christ, sur la croix, l'avait confiée. La première allusion attestée ne date que de la fin du 9e siècle, dans un manuscrit syriaque qui rapporte que Marie suit Jean à Éphèse et qu'elle y meurt. Personnellement, je fais bien plus confiance à cette hypothèse, car on sait que Jean s'était retiré à Éphèse avec Marie. En effet, on ignore ce qu'a pu être le reste de la vie de Marie, après les événements de Jérusalem qui ont vu la crucifixion de Jésus et sa résurrection. Une tradition plausible, mais invérifiable, fait venir Marie à Ephèse avec Jean. Dès le 2e siècle, les auteurs chrétiens soulignent le rôle exceptionnel tenu par Marie dans l'oeuvre de rédemption accomplie par son fils. En 431, le concile d'Ephèse la proclame Mère de Dieu: Theotokos. Peu à peu, l'idée s'impose que, pour être Mère de Dieu, il a fallu que Marie échappe à la souillure du péché, et qu'elle a pu également être glorifiée dans son âme et dans son corps à la fin de sa vie terrestre sans avoir à attendre la résurrection générale (fête à Antioche au 4e siècle; Dormition de la Vierge célébrée en Orient dès le 6e siècle; Grégoire de Tours élabore le concept de cette foi au 6e siècle). De là sont issus les dogmes de l'Immaculée Conception (proclamé le 8 décembre 1854 par le Pape Pie IX, nous en reparlerons dans un proche avenir) et de l'Assomption (proclamé le 1er novembre 1950 par le Pape Pie XII).
Les chrétiens orthodoxes célèbrent Marie le 15 août, et la liturgie byzantine est ainsi composée (Tropaire de la fête de la Dormition) : "Dans ton enfantement tu as gardé la virginité, dans ta dormition tu n'as pas quitté le monde, ô Mère de Dieu : tu as rejoint la source de Vie, toi qui conçus le Dieu vivant et qui, par tes prières, délivreras nos âmes de la mort." La mort de Marie est évoquée comme une dormition pour les chrétiens orientaux, comme une assomption pour les chrétiens catholiques romains. 
Quoi qu'il en soit de l'appellation retenue, la croyance religieuse orthodoxe et catholique affirme que la Vierge Marie, mère de Jésus, n'est pas morte comme tout un chacun mais est entrée directement dans la gloire de Dieu:  elle est « montée au ciel ».
Sans fondement directement scripturaire mais très ancienne dans la Tradition des Églises d’Orient comme d’Occident, la croyance fut définie comme dogme religieux, c’est-à-dire "vérité de foi chrétienne" par l’Église catholique en 1950. Tout en partageant la même foi en l'Assomption, les Églises orientales n'ont jamais souhaité définir la "Dormition" en termes dogmatiques.
Dans l’Église catholique, l’Assomption de la Vierge Marie est célébrée de manière solennelle, le 15 août.  Dans le calendrier anglican la fête de l’Assomption a disparu en 1549 mais le 15 août est resté la fête principale de la Vierge Marie, sans référence à son Assomption. La date du 15 août serait celle de la consécration à Jérusalem de la première église dédiée à Marie, Mère de Jésus Fils de Dieu, au 5e siècle, après le concile d'Éphèse (431).

Pour conclure, citons le texte de Saint Jean de Damas (v.675-749), moine, théologien, docteur de l'Église. Il s'agit d'une homélie qu'il a prononcée sur la Dormition.
<Mère de Dieu, toujours vierge, ton saint départ de ce monde est vraiment un passage, une entrée dans la demeure de Dieu. Sortant de ce monde matériel, tu entres dans une patrie meilleure (He 11,16 : une patrie meilleure, celle des cieux ) … Les apôtres ont porté ton corps sans tache, toi l'arche d'alliance véritable, et l'ont déposé à son saint tombeau. Et là, tu es parvenue à la vraie Terre promise, je veux dire à la "Jérusalem d'en haut", mère de tous les croyants (Ga 4,26:  la Jérusalem d’en haut est libre, et c’est elle, notre mère.) … car ton âme assurément n'est pas descendue dans le séjour des morts, bien plus ta chair elle-même n'a pas connu la corruption (Ps 15,9-10 : Mon coeur exulte, mon âme est en fête, ma chair elle-même repose en confiance : tu ne peux m'abandonner à la mort ni laisser ton ami voir la corruption. ; Ac 2,31-32: le patriarche David a vu d’avance la résurrection du Christ, dont il a parlé ainsi : Il n’a pas été abandonné à la mort, et sa chair n’a pas vu la corruption.  Jésus, Dieu l’a ressuscité ; nous tous, nous en sommes témoins.). Ton corps très pur, sans souillure, n'a pas été abandonné à la terre, mais tu as été emportée aux demeures du Royaume des Cieux, toi la reine, la souveraine, la dame, la Mère de Dieu, la véritable Theotokos … Aujourd'hui nous nous approchons de toi, notre reine, Mère de Dieu et Vierge ; nous tournons nos âmes vers l'espérance que tu es pour nous. >

Le 1er novembre 1950, le Pape Pie XII a solennellement défini que "l'Immaculée Mère de Dieu, Marie toujours Vierge, après avoir achevé le cours de sa vie terrestre, a été élevée en corps et en âme à la gloire céleste." 

Une illustration de la dormition se contemple au couvent orthodoxe de l'Emmanuel à Bethléem : fresque où l'on voit la vierge endormie et au-dessus Jésus avec l'âme de la Vierge.
 Jésus a pris avec lui l'âme de la Vierge Marie, sa mère, ce qui justifie le mot Assomption (qui signifie à l'origine : prendre avec soi).
Reportez-vous au blog diacretheophile21.blogspot.com en raison d'un problème technique de compatibilité avec le serveur. Veuillez m'en excuser.

 le jeudi 20 juillet 2017
Jacques Choquet

diacre

dimanche 18 juin 2017

Le Rosaire

Les entretiens du dimanche
34

La prière (3)

Le Rosaire

Théophile a provisoirement renoncé à préparer un exposé sur la prière du Notre Père, se rangeant à l'avis du Père Stanislas. Ayant déjà eu l'occasion de méditer sur le Rosaire, il se décida pour un résumé sur ce sujet, fortement inspiré des textes de Saint Jean-Paul II.
*****
Le Rosaire est composé de vingt "mystères" (événements, moments significatifs) de la vie de Jésus et de Marie, divisés en quatre chapelets, après la publication de la Lettre apostolique   Rosarium Virginis Mariae.
Le premier chapelet comprend les mystères joyeux ( priés et médités les lundi et samedi), le deuxième les  mystères lumineux (priés et médités le jeudi), le troisième les mystères douloureux (priés et médités les mardi et vendredi) et le quatrième les mystères glorieux (priés et médités les mercredi et dimanche). "Cette indication n'entend pas toutefois limiter une certaine liberté dans la méditation personnelle et communautaire, en fonction des exigences spirituelles et pastorales, et surtout des fêtes liturgiques qui peuvent susciter d'heureuses adaptations.".
Le Rosaire de la Vierge Marie, qui s'est développé progressivement au cours du deuxième millénaire sous l'inspiration de l'Esprit de Dieu, est une prière aimée de nombreux saints et encouragée par le Magistère. Dans sa simplicité et dans sa profondeur, il reste, même dans le troisième millénaire commençant, une prière d'une grande signification, destinée à porter des fruits de sainteté. Cette prière se situe bien dans la ligne spirituelle d'un christianisme qui, après deux mille ans, n'a rien perdu de la fraîcheur des origines et qui se sent poussé par l'Esprit de Dieu à « avancer au large » (Duc in altum!) pour redire, et même pour “crier” au monde, que le Christ est Seigneur et Sauveur, qu'il est « le chemin, la vérité et la vie » (Jn 14, 6), qu'il est «la fin de l'histoire humaine, le point vers lequel convergent les désirs de l'histoire et de la civilisation ».(Cf. Concile œcuménique Vatican II : Constitution pastorale sur l'Église dans le monde de ce temps Gaudium et spes, n.45.)
En effet, tout en ayant une caractéristique mariale, le Rosaire est une prière dont le centre est christologique. Dans la sobriété de ses éléments, il concentre en lui la profondeur de tout le message évangélique, dont il est presque un résumé : Paul VI, dans l'exhortation apostolique Marialis cultus, souligna, en harmonie avec l'inspiration du Concile Vatican II, le caractère évangélique du Rosaire et son orientation christologique.
 En lui résonne à nouveau la prière de Marie, son Magnificat permanent pour l'œuvre de l'Incarnation rédemptrice qui a commencé dans son sein virginal. Avec lui, le peuple chrétien se met à l'école de Marie, pour se laisser introduire dans la contemplation de la beauté du visage du Christ et dans l'expérience de la profondeur de son amour. Par le Rosaire, le croyant puise d'abondantes grâces, les recevant presque des mains mêmes de la Mère du Rédempteur. 
Saint Jean-Paul II rappelle qu’il n’a négligé aucune occasion pour exhorter à la récitation fréquente du Rosaire. Depuis ses plus jeunes années, cette prière a eu une place importante dans sa vie spirituelle. Le Rosaire l'a accompagné dans les temps de joie et dans les temps d'épreuve. Il lui a confié de nombreuses préoccupations. En lui, il a toujours trouvé le réconfort.
C'est pourquoi, faisant suite à la réflexion proposée dans la Lettre apostolique Novo millennio ineunte, dans laquelle, après l'expérience jubilaire, il a invité le Peuple de Dieu à «repartir du Christ »,il a senti la nécessité de développer une réflexion sur le Rosaire, presque comme un couronnement marial de cette lettre apostolique, pour exhorter à la contemplation du visage du Christ en compagnie de sa très sainte Mère et à son école. En effet, réciter le Rosaire n'est rien d'autre que contempler avec Marie le visage du Christ.
        L'opportunité d'une telle initiative découle de diverses considérations:
1- La première concerne l'urgence de faire face à une certaine crise de cette prière qui, dans le contexte historique et théologique actuel, risque d'être à tort amoindrie dans sa valeur et ainsi rarement proposée aux nouvelles générations.
2- D'aucuns pensent que le caractère central de la liturgie, à juste titre souligné par le Concile œcuménique Vatican II, a eu comme conséquence nécessaire une diminution de l'importance du Rosaire. En réalité, comme le précisait Paul VI, cette prière non seulement ne s'oppose pas à la liturgie, mais en constitue un support, puisqu'elle l'introduit bien et s'en fait l'écho, invitant à la vivre avec une plénitude de participation intérieure, afin d'en recueillir des fruits pour la vie quotidienne.
3- D'autres craignent peut-être qu'elle puisse apparaître peu œcuménique en raison de son caractère nettement marial. En réalité, elle se situe dans la plus pure perspective d'un culte à la Mère de Dieu, comme le Concile Vatican II l'a défini: un culte orienté vers le centre christologique de la foi chrétienne, de sorte que, « à travers l'honneur rendu à sa Mère, le Fils [...] soit connu, aimé, glorifié ».S'il est redécouvert de manière appropriée, le Rosaire constitue une aide, mais certainement pas un obstacle à l'œcuménisme.
4- Cependant, la raison la plus importante de redécouvrir avec force la pratique du Rosaire est le fait que ce dernier constitue un moyen très valable pour favoriser chez les fidèles l'engagement de contemplation du mystère chrétien que Saint Jean-Paul II a proposé dans la lettre apostolique  Novo millennio ineunte comme une authentique “pédagogie de la sainteté”: « Il faut un christianisme qui se distingue avant tout dans l'art de la prière. Alors que dans la culture contemporaine, même au milieu de nombreuses contradictions, affleure une nouvelle exigence de spiritualité, suscitée aussi par les influences d'autres religions, il est plus que jamais urgent que nos communautés chrétiennes deviennent d'authentiques écoles de prière »
5- Certaines circonstances historiques ont contribué à une meilleure actualisation du renouveau du Rosaire. La première d'entre elles est l'urgence d'implorer de Dieu le don de la paix. Au début d'un millénaire, qui a commencé avec les scènes horribles de l'attentat du 11 septembre 2001 et qui enregistre chaque jour dans de nombreuses parties du monde de nouvelles situations de sang et de violence, redécouvrir le Rosaire signifie s'immerger dans la contemplation du mystère de Celui « qui est notre paix », ayant fait « de deux peuples un seul, détruisant la barrière qui les séparait, c'est-à- dire la haine » (Ep 2, 14). On ne peut donc réciter le Rosaire sans se sentir entraîné dans un engagement précis de service de la paix, avec une attention particulière envers la terre de Jésus, encore si éprouvée, et particulièrement chère au cœur des chrétiens.
6- De manière analogue, il est urgent de s'engager et de prier pour une autre situation critique de notre époque, celle de la famille, cellule de la société, toujours plus attaquée par des forces destructrices, au niveau idéologique et pratique, qui font craindre pour l'avenir de cette institution fondamentale et irremplaçable, et, avec elle, pour le devenir de la société entière. Dans le cadre plus large de la pastorale familiale, le renouveau du Rosaire dans les familles chrétiennes se propose comme une aide efficace pour endiguer les effets dévastateurs de la crise actuelle.

Théophile ajouta à ces extraits une méditation personnelle sur les mystères joyeux. La voici:
Octobre est le mois du Rosaire. Le Rosaire de la Vierge Marie est une prière aimée de nombreux saints et encouragée par l’Église. Prière simple mais ne manquant pas de profondeur, le Rosaire se composait jusqu’au 16 octobre 2003 de la récitation de trois chapelets, soit 15 dizaines de « Je vous salue, Marie », regroupées en trois mystères : les mystères joyeux, les mystères douloureux, et enfin les mystères glorieux. Par la lettre apostolique « ROSARIUM VIRGINIS MARIAE », le Pape Saint Jean-Paul II  a ajouté un quatrième groupe de mystères : les mystères lumineux. Nous abordons les mystères joyeux qu’on récite et médite habituellement le lundi et le samedi.
Les mystères joyeux font appel à cinq textes issus de l’évangile selon saint Luc. Ce sont : l’Annonciation, la Visitation, la Nativité, la présentation de Jésus au Temple, et enfin Jésus et les docteurs de la Loi au Temple. « Joyeux » parce que ces textes sont relatifs à la naissance de Jésus, Fils de Dieu, venu dans notre monde pour révéler tout l’amour que Dieu porte à sa création et à l’humanité en particulier.

L’Annonciation.


L’archange Gabriel vient annoncer à Marie qu’elle donnera naissance à un fils. Le texte qui suit et illustre cette annonce est tiré de l’évangile de Luc, chapitre 1, versets 26 à 38.

26 Le sixième mois, l'ange Gabriel fut envoyé par Dieu dans une ville de Galilée, appelée Nazareth, 27 à une jeune fille, une vierge, accordée en mariage à un homme de la maison de David, appelé Joseph ; et le nom de la jeune fille était Marie.
28 L'ange entra chez elle et dit : “ Je te salue, Comblée-de-grâce, le Seigneur est avec toi. ” 29 A cette parole, elle fut toute bouleversée, et elle se demandait ce que pouvait signifier cette salutation, 30 L'ange lui dit alors : “ Sois sans crainte, Marie, car tu as trouvé grâce auprès de Dieu. 31 Voici que tu vas concevoir et enfanter un fils ; tu lui donneras le nom de Jésus. 32 Il sera grand, il sera appelé Fils du Très-Haut ; le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père ; 33 il régnera pour toujours sur la maison de Jacob, et son règne n'aura pas de fin. ”
34 Marie dit à l'ange : “ Comment cela va-t-il se faire, puisque je suis vierge ? ”  35 L'ange lui répondit : “ L'Esprit Saint viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre ; c'est pourquoi celui qui va naître sera saint, et il sera appelé Fils de Dieu. 36 Et voici qu'Élisabeth, ta cousine, a conçu, elle aussi, un fils dans sa vieillesse et elle en est à son sixième mois, alors qu'on l'appelait : 'la femme stérile'.    37 Car rien n'est impossible à Dieu. ” 38 Marie dit alors : “ Voici la servante du  Seigneur ; que tout se passe pour moi selon ta parole. ”
Alors l'ange la quitta.

Proposition de méditation

« Sois sans crainte … Comment cela va-t-il se faire ? … Rien n'est impossible à Dieu … Que tout se passe pour moi selon ta parole. »

Ces quelques mots extraits de l’évangile pourraient guider notre réflexion. Nous n’avons pas été baptisés pour attendre que le temps passe sans rien faire. Dieu attend de chaque baptisé qu’il entre librement à son service.
Dans ma vie, Dieu m’a certainement appelé, certainement sollicité. Qu’ai-je répondu : « Que tout se passe pour moi selon ta parole » ou bien « Attend, Seigneur, aujourd’hui je n’ai pas le temps » ?

La Visitation.


L’archange Gabriel a annoncé à Marie que sa cousine Élisabeth attendait un enfant, malgré son âge avancé. Cet enfant jouera un rôle important, précédant Jésus, d’où son surnom de précurseur. Écoutons le texte de saint Luc (1,39-56), où se situe la rencontre de la mère du Messie et de la mère du Précurseur, suivie de l’action de grâce de Marie.

39 En ces jours-là, Marie se mit en route rapidement vers une ville de la montagne de Judée. 40 Elle entra dans la maison de Zacharie et salua Élisabeth. 41 Or, quand Élisabeth entendit la salutation de Marie, l'enfant tressaillit en elle. Alors, Élisabeth fut remplie de l'Esprit Saint, 42 et s'écria d'une voix forte : “ Tu es bénie entre toutes les femmes, et le fruit de tes entrailles est béni. 43 Comment ai-je ce bonheur que la mère de mon Seigneur vienne jusqu'à moi ? 44 Car, lorsque j'ai entendu tes paroles de salutation, l'enfant a tressailli d'allégresse au-dedans de moi. 45 Heureuse celle qui a cru à l'accomplissement des paroles qui lui furent dites de la part du Seigneur. ”
46 Marie dit alors :
“ Mon âme exalte le Seigneur,
47          mon esprit exulte en Dieu mon Sauveur.
48          Il s'est penché sur son humble servante ;
désormais tous les âges me diront bienheureuse.
49          Le Puissant fit pour moi des merveilles ;
Saint est son nom !
50          Son amour s'étend d'âge en âge
sur ceux qui le craignent.
51          Déployant la force de son bras,
il disperse les superbes.
52          Il renverse les puissants de leurs trônes,
il élève les humbles.
53          Il comble de bien les affamés,
renvoie les riches les mains vides.
54          Il relève Israël son serviteur,
il se souvient de son amour,
55          de la promesse faite à nos pères,
en faveur d'Abraham et de sa race à jamais. ”
56 Marie demeura avec Élisabeth environ trois mois, puis elle s'en retourna chez elle.

Proposition de méditation

En dehors de l’admirable « Magnificat » qui mérite une étude à lui tout seul, nous retiendrons quelques mots extraits de l’évangile, mots que voici :
« Marie se mit en route rapidement … Heureuse celle qui a cru à l'accomplissement des paroles qui lui furent dites de la part du Seigneur. »

La foi soulève des montagnes, dit-on. Ici la foi en la parole de Dieu se révèle sans restriction dans le fait que Marie se mit en route rapidement. Dieu demande, et son disciple ne prend point de retard à accomplir le souhait formulé.
Il nous arrive d’être saisi par une lecture de la Bible. Au-delà de ce saisissement immédiat, notre réponse est bien souvent tardive, voire inexistante. 

La Nativité.

Le thème de la naissance de Jésus constitue le troisième mystère joyeux. Le récit se trouve dans l’évangile de Luc (2, 1-20) et relate la naissance de Jésus et la visite des bergers à la grotte.
1 En ces jours-là, parut un édit de l'empereur Auguste, ordonnant de recenser toute la terre - 2 ce premier recensement eut lieu lorsque Quirinius était gouverneur de Syrie. - 3 Et chacun allait se faire inscrire dans sa ville d'origine.
4 Joseph, lui aussi, quitta la ville de Nazareth en Galilée, pour monter en Judée, à la ville de David appelée Bethléem, car il était de la maison et de la descendance de David. 5 Il venait se faire inscrire avec Marie, son épouse, qui était enceinte. 6 Or, pendant qu'ils étaient là, arrivèrent les jours où elle devait enfanter.   7 Et elle mit au monde son fils premier-né ; elle l'emmaillota et le coucha dans une mangeoire, car il n'y avait pas de place pour eux dans la salle commune.
8 Dans les environs se trouvaient des bergers qui passaient la nuit dans les champs pour garder leurs troupeaux. 9 L'ange du Seigneur s'approcha, et la gloire du Seigneur les enveloppa de sa lumière. Ils furent saisis d'une grande crainte,        10 mais l'ange leur dit : “ Ne craignez pas, car voici que je viens vous annoncer une bonne nouvelle, une grande joie pour tout le peuple : 11 Aujourd'hui vous est né un Sauveur, dans la ville de David. Il est le Messie, le Seigneur. 12 Et voilà le signe qui vous est donné : vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire. ” 13 Et soudain, il y eut avec l'ange une troupe céleste innombrable, qui louait Dieu en disant :
14                     Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre aux hommes qu'il aime.”
15 Lorsque les anges eurent quitté les bergers pour le ciel, ceux-ci se disaient entre eux : “ Allons jusqu'à Bethléem pour voir ce qui est arrivé, et que le Seigneur nous a fait connaître. ” 16 Ils se hâtèrent d'y aller, et ils découvrirent Marie et Joseph, avec le nouveau-né couché dans la mangeoire. 17 Après l'avoir vu, ils racontèrent ce qui leur avait été annoncé au sujet de cet enfant. 18 Et tout le monde s'étonnait de ce que racontaient les bergers.
19 Marie, cependant, retenait tous ces événements et les méditait dans son coeur.
20 Les bergers repartirent ; ils glorifiaient et louaient Dieu pour tout ce qu'ils avaient entendu et vu selon ce qui leur avait été annoncé.

Proposition de méditation

L’empereur de Rome, tout-puissant, ordonne. En fait n’est-il pas l’instrument inconscient de la volonté divine ? Quel contraste entre cet homme omnipotent et richissime,  et l’enfant qui vient de naître si pauvre ! L’empereur n’a eu qu’un règne limité dans le temps, et le nouveau-né si humble aura une influence décisive sur la pensée de millions d’hommes et son règne dure toujours.
Nous hésitons quelquefois à faire un geste, ou entreprendre une action qui nous paraissent sans grande portée : que dire alors de notre foi en Dieu ?

La présentation de Jésus au Temple



Nous continuons avec saint Luc à vivre les premiers instants de la vie de Jésus. C’est au chapitre 2, versets 21 à 38 que l’épisode de la présentation de Jésus est évoquée. Il y a deux moments importants: la prophétie du vieillard Syméon et l’intervention de la prophétesse Anne.

21 Quand fut arrivé le huitième jour, celui de la circoncision, l'enfant reçut le nom de Jésus, le nom que l'ange lui avait donné avant sa conception.
22 Quand arriva le jour fixé par la loi de Moïse pour la purification, les parents de Jésus le portèrent à Jérusalem pour le présenter au Seigneur, 23 selon ce qui est écrit dans la Loi : Tout premier-né de sexe masculin sera consacré au Seigneur. 24 Ils venaient aussi présenter en offrande le sacrifice prescrit par la loi du Seigneur : un couple de tourterelles ou deux petites colombes.
25 Or, il y avait à Jérusalem un homme appelé Syméon. C'était un homme juste et religieux, qui attendait la Consolation d'Israël, et l'Esprit Saint était sur lui.             26 L'Esprit lui avait révélé qu'il ne verrait pas la mort avant d'avoir vu le Messie du Seigneur. 27 Poussé par l'Esprit, Syméon vint au Temple. Les parents y entraient avec l'enfant Jésus pour accomplir les rites de la Loi qui le concernaient. 28 Syméon prit l'enfant dans ses bras, et il bénit Dieu en disant :
29     “ Maintenant, ô Maître souverain,
tu peux laisser ton serviteur
s'en aller en paix, selon ta parole.
30     Car mes yeux ont vu le salut,
31     que tu préparais à la face des peuples :
32     lumière qui se révèle aux nations,
et donne gloire à ton peuple Israël”

33 Le père et la mère de l'enfant s'étonnaient de ce qu'on disait de lui.
34 Syméon les bénit, puis il dit à Marie sa mère : “ Vois, ton fils qui est là provoquera la chute et le relèvement de beaucoup en Israël. Il sera un signe de division. 35 - Et toi-même, ton coeur sera transpercé par une épée. - Ainsi seront dévoilées les pensées secrètes d'un grand nombre. ”
36 Il y avait là une femme qui était prophète, Anne, fille de Phanuel, de la tribu d'Aser. 37 Demeurée veuve après sept ans de mariage, elle avait atteint l'âge de quatre-vingt-quatre ans. Elle ne s'éloignait pas du Temple, servant Dieu jour et nuit dans le jeûne et la prière, 38 S'approchant d'eux à ce moment, elle proclamait les louanges de Dieu et parlait de l'enfant à tous ceux qui attendaient la délivrance de Jérusalem.

Proposition de méditation

Deux prophéties. Celle de Syméon anticipe le rôle de l’enfant et son influence future sur les hommes de son temps et ceux des siècles à venir, placés devant le choix de croire en lui et de le reconnaître comme le Fils de Dieu venant révéler tout du Père, ou refuser son enseignement et sa divinité. Celle de la prophétesse, qui tout en reconnaissant l’action de Dieu, annonce une délivrance que les contemporains de Jésus auront bien du mal à discerner.
Et nous ? Que disons-nous à propos de Jésus ? Est-il pour nous un moraliste comme tant d’autres ou est-il Fils de Dieu ? Acceptons-nous sans réserve son enseignement ou ne retenons-nous que ce qui nous intéresse comme certains chrétiens le font ?

Jésus et les docteurs de la Loi


Lorsque Jésus eut douze ans, il accompagna ses parents à Jérusalem pour les fêtes de la Pâque. Sur la route du retour ses parents ne le virent point, croyant que Jésus se trouvait auprès de ceux qui avaient fait le pèlerinage avec ses parents. Il n’en était rien et Joseph et Marie durent retourner à Jérusalem. Or Jésus était au Temple chez son Père. Voici les faits tels que saint Luc les a rapportés (Lc 2,41-52) :

41 Chaque année, les parents de Jésus allaient à Jérusalem pour la fête de la Pâque. 42 Quand il eut douze ans, ils firent le pèlerinage suivant la coutume. 43 Comme ils s'en retournaient à la fin de la semaine, le jeune Jésus resta à Jérusalem sans que ses parents s'en aperçoivent. 44 Pensant qu'il était avec leurs compagnons de route, ils firent une journée de chemin avant de le chercher parmi leurs parents et connaissances. 45 Ne le trouvant pas, ils revinrent à Jérusalem en continuant à le chercher.
46 C'est au bout de trois jours qu'ils le trouvèrent dans le Temple, assis au milieu des docteurs de la Loi : il les écoutait et leur posait des questions, 47 et tous ceux qui l'entendaient s'extasiaient sur son intelligence et sur ses réponses. 48 En le voyant, ses parents furent stupéfaits, et sa mère lui dit : “Mon enfant, pourquoi nous as-tu fait cela ? Vois comme nous avons souffert en te cherchant, ton père et moi ! ” 49 Il leur dit : “ Comment se fait-il que vous m'ayez cherché ? Ne le saviez-vous pas ? C'est chez mon Père que je dois être. ” 50 Mais ils ne comprirent pas ce qu'il leur disait.
51 Il descendit avec eux pour rentrer à Nazareth, et il leur était soumis. Sa mère gardait dans son coeur tous ces événements. 52 Quant à Jésus, il grandissait en sagesse, en taille et en grâce, sous le regard de Dieu et des hommes.

Proposition de méditation

Ce qui est frappant dans ce passage, c’est la soumission du Christ à ses parents. Contraste étonnant entre l’enfant qui fait l’admiration des docteurs de la Loi malgré son jeune âge, et sa soumission à ses parents.
Belle leçon d’humilité que nous pourrions méditer lorsque nous critiquons notre pape et l’Église.
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Voilà. Théophile va prendre quelques vacances pour se reposer, car sa santé n'est pas florissante. Les fortes chaleurs du début du mois l'ont fortement éprouvé. Les soins de son épouse et la lente dégradation de son esprit mettent à forte contribution les nerfs de Théophile. Sainte Élisabeth de la Trinité a intercédé pour lui et une lourde opération ne sera pas nécessaire; grâce soit rendue à elle.

Au revoir. Bonnes vacances à tous ceux qui pourront en avoir. À septembre prochain!


Dimanche 18 juin 2017

mercredi 31 mai 2017

Prier avec. les psaumes

Les entretiens du dimanche
33

2- La prière

Prier avec les psaumes


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En l'absence de Candide, Théophile travaillait sur le thème de la prière que lui avait suggéré le Père Stanislas. Aujourd'hui, il préparait l'exposé sur les psaumes. Comment prier avec les psaumes? Il était perplexe: en effet, bien que faisant partie de la prière diaconale de chaque jour, rares étaient les psaumes qui l'avaient touchés. Deux seulement; le psaume 116, car c'est le plus court de tous, et le psaume 130 (131) qui provoquait toujours en lui une grande émotion. Théophile se souvenait avec précision du jour où ce psaume l'avait bouleversé.
C'était en juillet 19**. Il avait été invité avec son épouse par son ancien évêque à une retraite à Ars, où il retrouvait les diacres et les postulants au diaconat du diocèse où il avait entrepris son cheminement pour être ordonné diacre. Il y avait six mois qu'il avait quitté O*** pour venir se retirer en Bourgogne suite à sa retraite professionnelle, avec l'espoir d'être ordonné diacre. Son diocèse d'accueil ne se pressait pas pour l'intégrer au groupe des cheminants. À vrai dire, on semblait même l'avoir oublié. Ces moments étaient difficiles à vivre, et Théophile garderait toujours en lui une certaine amertume, des regrets et des doutes. Mais le Christ ne l'oubliait pas et il allait lui donner une grâce toute particulière par le biais du psaume 130:
01 Seigneur, je n'ai pas le coeur fier ni le regard ambitieux ; je ne poursuis ni grands desseins, ni merveilles qui me dépassent.
02 Non, mais je tiens mon âme égale et silencieuse ; mon âme est en moi comme un enfant, comme un petit enfant contre sa mère.
03 Attends le Seigneur, Israël, maintenant et à jamais.

Ce psaume apaisant allait toujours être présent à l'esprit de Théophile, et rien que de l'évoquer lui apportait la paix de l'âme. En effet, ce merveilleux psaume inspire un sentiment d'abandon: comme le bébé confiant en l'amour de sa mère, sûr de la protection maternelle, ce psaume invite à s'abandonner entièrement à Dieu. Dieu ne peut pas m'abandonner, Dieu veille sur moi. Que mon âme soit en paix, sans trouble, sans angoisse, sans peur. S'anéantir en Dieu, comme Jésus s'est abandonné au Père et s'est abaissé pour être serviteur (Cf. : Ph 2, 3-8):
Le Christ Jésus, lui qui était dans la condition de Dieu, n'a pas jugé bon de revendiquer son droit d'être traité à l'égal de Dieu; mais au contraire, il se dépouilla lui-même en prenant la condition de serviteur … Il s'est abaissé lui-même en devenant obéissant jusqu'à mourir, et à mourir sur une croix.
Au temps de Jésus, l'enfant n'est rien. Jésus a changé cela en disant: « Si vous ne retournez à l'état des enfants, vous n'entrerez pas dans le Royaume des Cieux. » (Mt 18,3) Il y a là une invitation à reconnaître que Dieu agit envers nous à la façon d'un père qui a la tendresse d'une mère.
     Thérèse de l'Enfant Jésus en a fait l'expérience, elle qui est connue pour avoir emprunté la Petite Voie : « Rester petit, c'est reconnaître son néant, attendre tout du Bon Dieu, ne pas trop s'affliger de ses fautes, ne point gagner de fortune, ne s'inquiéter de rien,... vouloir ne pas se suffire à soi-même,... se sentir incapable de gagner sa vie, la Vie éternelle... »

Théophile avait décidé de suivre le chemin que Jésus lui indiquait, le suivre contre vents et marées, le suivre sans s'affliger des rebuffades, des oublis, des rejets, des silences méprisants.

Théophile mit un terme à ses souvenirs. Il prit une feuille de papier mais n'écrivit rien, car il lui était impossible d'échapper au charme paisible de ce psaume. Il s'imagina même que ce psaume avait été composé par une femme abritant son enfant dans ses bras. Il ne put s'empêcher de comparer l'amour de cette femme pour son enfant à l'amour de Dieu pour l'humanité. Ah! Quel bonheur de s’abandonner au Seigneur avec la simplicité d’un enfant, sans inquiétude ni ambition.
Et Théophile replongea dans sa rêverie. La feuille de papier devant lui restait vierge de tout mot. Ce petit psaume lui en rappela un autre, encore plus court puisqu'il n'a que deux versets (Ps 116): 
01 Louez le Seigneur, tous les peuples ; fêtez-le, tous les pays !
02 Son amour envers nous s'est montré le plus fort ; éternelle est la fidélité du Seigneur !
Il sembla à Théophile que les deux psaumes étaient comme des jumeaux: semblables mais cependant différents. Louer Dieu, imaginer des célébrations joyeuses pour le fêter, affirmer que Dieu nous aime et nous soutient, même dans les pires difficultés! Un petit conte revint alors en mémoire à Théophile: sur une plage de sable fin, il y avait deux traces de pas, celle de Dieu et celle de l'homme qui marchaient ensemble … Et puis, soudain, il n'y eut plus qu'une trace. Alors, l'homme interpela Dieu: "Pourquoi m'as-tu abandonné?" Et Dieu lui dit: "Ce n'est pas la trace de tes pas que tu vois, mais la mienne, car je te portes sur mes épaules". … Théophile pensa: "Combien de fois, Seigneur, ai-je eu la même réaction que cet homme, que tu m'avais abandonné!"

L'esprit de Théophile continua à vagabonder dans une douce rêverie. Soudain, il sursauta; un bruit venait de le tirer de ses rêves. C'était en fait le Père Stanislas qui le saluait: 
-"Et bien! Théophile, on rêve?"
-"Non pas, mon Père. J'étais avec Dieu qui me parlait par psaumes interposés."
-"Ah bon … heureux homme! … ces brouillons, ce sont vos notes sur les psaumes? … et la feuille de papier appelée à recueillir le fruit de votre méditation est toujours blanche … Voyons voir ces brouillons."
-"Ce ne sont pas des brouillons personnels, mais des extraits glanés par çi par là."

Le Père Stanislas s'empara des notes. Il les parcourut tranquillement, et voilà ce qu'il lut:
Jésus ne nous a pas seulement dit de prier comme il nous l'a appris, mais aussi de prier en son nom (Jn 14,13-14). Jésus intervient constamment en notre faveur devant Dieu, et par l'Esprit Saint nous pouvons entrer dans la relation qui unit le Fils à son Père. Notre prière a donc un fondement trinitaire : nous adressons notre prière au Père parce que nous sommes ses enfants, à Jésus-Christ parce que nous sommes ses disciples, à l'Esprit Saint parce que nous sommes les héritiers de Jésus-Christ. La prière, c'est le courant trinitaire qui passe en nous, par la grâce qui est don gratuit.

Les auteurs du Nouveau Testament citent les psaumes (en hébreu: « livre des louanges ») pour montrer comment Jésus a assumé, renouvelé, accompli ce qu'ils annonçaient. Le Christ est tout à la fois, pour un chrétien, le Dieu qui est prié dans les psaumes, et l'homme qui prie Dieu à l'aide des psaumes. La pratique des psaumes est la première école de la prière chrétienne.

Si certains passages des psaumes peuvent apparaître contraires à l'Évangile et inacceptables pour un disciple du Christ [par exemple Ps 57(58) et Ps 147 (7-9)], n'oublions pas que le coeur de la prière biblique est l'expression d'une lutte permanente pour la justice de Dieu contre l'injustice du monde. Toute la vie de Jésus fut une lutte contre le Prince de ce monde: le choix baptismal est la lutte des fils de lumière.

La pratique des psaumes est la première école de la prière chrétienne. Les psaumes ouvrent alors deux directions de prière:
-La première consiste à s'adresser au Christ, le Dieu et le Seigneur des psaumes.
-La seconde consiste à considérer que le psalmiste est le Christ lui-même. La pratique des psaumes est vraiment la première école de la prière chrétienne.
Il y a des psaumes pour toutes les occasion de la vie: la joie, la souffrance, la maladie, l'action de grâce, l'espérance, les pauvres, et plus encore.

Pour recevoir de l'Esprit la vie comme un don, pour retourner au Père notre existence croyante, pour être en vérité au nombre de ceux qui sont assemblés au nom de Jésus, l'Église s'est donné sa propre prière, affinée et adaptée au cours du temps; c'est "la liturgie des heures". Prière d'une très grande richesse, c'est une prière de la foi, aux dimensions universelles. Elle est tout à la fois écoute de la Parole de Dieu, louange et action de grâce, union à Jésus, le Fils, pour apprendre comment prier le Père dans l'Esprit. Cette prière de l'Église fait prier en nous le Christ en faisant de nous, chrétiens, un corps.

-"Pas mal … Intéressant … Continuez, mon ami."

Théophile se mit alors en devoir d'écrire son texte. Ne le dérangeons pas. Il reviendra bientôt pour nous parler du "Notre Père".




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Chers lecteurs, si vous avez des remarques, des observations ou des questions, écrivez-moi à l'adresse jacques.choquet2@orange.fr
À suivre … si vous le voulez bien.