mercredi 31 mai 2017

Prier avec. les psaumes

Les entretiens du dimanche
33

2- La prière

Prier avec les psaumes


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En l'absence de Candide, Théophile travaillait sur le thème de la prière que lui avait suggéré le Père Stanislas. Aujourd'hui, il préparait l'exposé sur les psaumes. Comment prier avec les psaumes? Il était perplexe: en effet, bien que faisant partie de la prière diaconale de chaque jour, rares étaient les psaumes qui l'avaient touchés. Deux seulement; le psaume 116, car c'est le plus court de tous, et le psaume 130 (131) qui provoquait toujours en lui une grande émotion. Théophile se souvenait avec précision du jour où ce psaume l'avait bouleversé.
C'était en juillet 19**. Il avait été invité avec son épouse par son ancien évêque à une retraite à Ars, où il retrouvait les diacres et les postulants au diaconat du diocèse où il avait entrepris son cheminement pour être ordonné diacre. Il y avait six mois qu'il avait quitté O*** pour venir se retirer en Bourgogne suite à sa retraite professionnelle, avec l'espoir d'être ordonné diacre. Son diocèse d'accueil ne se pressait pas pour l'intégrer au groupe des cheminants. À vrai dire, on semblait même l'avoir oublié. Ces moments étaient difficiles à vivre, et Théophile garderait toujours en lui une certaine amertume, des regrets et des doutes. Mais le Christ ne l'oubliait pas et il allait lui donner une grâce toute particulière par le biais du psaume 130:
01 Seigneur, je n'ai pas le coeur fier ni le regard ambitieux ; je ne poursuis ni grands desseins, ni merveilles qui me dépassent.
02 Non, mais je tiens mon âme égale et silencieuse ; mon âme est en moi comme un enfant, comme un petit enfant contre sa mère.
03 Attends le Seigneur, Israël, maintenant et à jamais.

Ce psaume apaisant allait toujours être présent à l'esprit de Théophile, et rien que de l'évoquer lui apportait la paix de l'âme. En effet, ce merveilleux psaume inspire un sentiment d'abandon: comme le bébé confiant en l'amour de sa mère, sûr de la protection maternelle, ce psaume invite à s'abandonner entièrement à Dieu. Dieu ne peut pas m'abandonner, Dieu veille sur moi. Que mon âme soit en paix, sans trouble, sans angoisse, sans peur. S'anéantir en Dieu, comme Jésus s'est abandonné au Père et s'est abaissé pour être serviteur (Cf. : Ph 2, 3-8):
Le Christ Jésus, lui qui était dans la condition de Dieu, n'a pas jugé bon de revendiquer son droit d'être traité à l'égal de Dieu; mais au contraire, il se dépouilla lui-même en prenant la condition de serviteur … Il s'est abaissé lui-même en devenant obéissant jusqu'à mourir, et à mourir sur une croix.
Au temps de Jésus, l'enfant n'est rien. Jésus a changé cela en disant: « Si vous ne retournez à l'état des enfants, vous n'entrerez pas dans le Royaume des Cieux. » (Mt 18,3) Il y a là une invitation à reconnaître que Dieu agit envers nous à la façon d'un père qui a la tendresse d'une mère.
     Thérèse de l'Enfant Jésus en a fait l'expérience, elle qui est connue pour avoir emprunté la Petite Voie : « Rester petit, c'est reconnaître son néant, attendre tout du Bon Dieu, ne pas trop s'affliger de ses fautes, ne point gagner de fortune, ne s'inquiéter de rien,... vouloir ne pas se suffire à soi-même,... se sentir incapable de gagner sa vie, la Vie éternelle... »

Théophile avait décidé de suivre le chemin que Jésus lui indiquait, le suivre contre vents et marées, le suivre sans s'affliger des rebuffades, des oublis, des rejets, des silences méprisants.

Théophile mit un terme à ses souvenirs. Il prit une feuille de papier mais n'écrivit rien, car il lui était impossible d'échapper au charme paisible de ce psaume. Il s'imagina même que ce psaume avait été composé par une femme abritant son enfant dans ses bras. Il ne put s'empêcher de comparer l'amour de cette femme pour son enfant à l'amour de Dieu pour l'humanité. Ah! Quel bonheur de s’abandonner au Seigneur avec la simplicité d’un enfant, sans inquiétude ni ambition.
Et Théophile replongea dans sa rêverie. La feuille de papier devant lui restait vierge de tout mot. Ce petit psaume lui en rappela un autre, encore plus court puisqu'il n'a que deux versets (Ps 116): 
01 Louez le Seigneur, tous les peuples ; fêtez-le, tous les pays !
02 Son amour envers nous s'est montré le plus fort ; éternelle est la fidélité du Seigneur !
Il sembla à Théophile que les deux psaumes étaient comme des jumeaux: semblables mais cependant différents. Louer Dieu, imaginer des célébrations joyeuses pour le fêter, affirmer que Dieu nous aime et nous soutient, même dans les pires difficultés! Un petit conte revint alors en mémoire à Théophile: sur une plage de sable fin, il y avait deux traces de pas, celle de Dieu et celle de l'homme qui marchaient ensemble … Et puis, soudain, il n'y eut plus qu'une trace. Alors, l'homme interpela Dieu: "Pourquoi m'as-tu abandonné?" Et Dieu lui dit: "Ce n'est pas la trace de tes pas que tu vois, mais la mienne, car je te portes sur mes épaules". … Théophile pensa: "Combien de fois, Seigneur, ai-je eu la même réaction que cet homme, que tu m'avais abandonné!"

L'esprit de Théophile continua à vagabonder dans une douce rêverie. Soudain, il sursauta; un bruit venait de le tirer de ses rêves. C'était en fait le Père Stanislas qui le saluait: 
-"Et bien! Théophile, on rêve?"
-"Non pas, mon Père. J'étais avec Dieu qui me parlait par psaumes interposés."
-"Ah bon … heureux homme! … ces brouillons, ce sont vos notes sur les psaumes? … et la feuille de papier appelée à recueillir le fruit de votre méditation est toujours blanche … Voyons voir ces brouillons."
-"Ce ne sont pas des brouillons personnels, mais des extraits glanés par çi par là."

Le Père Stanislas s'empara des notes. Il les parcourut tranquillement, et voilà ce qu'il lut:
Jésus ne nous a pas seulement dit de prier comme il nous l'a appris, mais aussi de prier en son nom (Jn 14,13-14). Jésus intervient constamment en notre faveur devant Dieu, et par l'Esprit Saint nous pouvons entrer dans la relation qui unit le Fils à son Père. Notre prière a donc un fondement trinitaire : nous adressons notre prière au Père parce que nous sommes ses enfants, à Jésus-Christ parce que nous sommes ses disciples, à l'Esprit Saint parce que nous sommes les héritiers de Jésus-Christ. La prière, c'est le courant trinitaire qui passe en nous, par la grâce qui est don gratuit.

Les auteurs du Nouveau Testament citent les psaumes (en hébreu: « livre des louanges ») pour montrer comment Jésus a assumé, renouvelé, accompli ce qu'ils annonçaient. Le Christ est tout à la fois, pour un chrétien, le Dieu qui est prié dans les psaumes, et l'homme qui prie Dieu à l'aide des psaumes. La pratique des psaumes est la première école de la prière chrétienne.

Si certains passages des psaumes peuvent apparaître contraires à l'Évangile et inacceptables pour un disciple du Christ [par exemple Ps 57(58) et Ps 147 (7-9)], n'oublions pas que le coeur de la prière biblique est l'expression d'une lutte permanente pour la justice de Dieu contre l'injustice du monde. Toute la vie de Jésus fut une lutte contre le Prince de ce monde: le choix baptismal est la lutte des fils de lumière.

La pratique des psaumes est la première école de la prière chrétienne. Les psaumes ouvrent alors deux directions de prière:
-La première consiste à s'adresser au Christ, le Dieu et le Seigneur des psaumes.
-La seconde consiste à considérer que le psalmiste est le Christ lui-même. La pratique des psaumes est vraiment la première école de la prière chrétienne.
Il y a des psaumes pour toutes les occasion de la vie: la joie, la souffrance, la maladie, l'action de grâce, l'espérance, les pauvres, et plus encore.

Pour recevoir de l'Esprit la vie comme un don, pour retourner au Père notre existence croyante, pour être en vérité au nombre de ceux qui sont assemblés au nom de Jésus, l'Église s'est donné sa propre prière, affinée et adaptée au cours du temps; c'est "la liturgie des heures". Prière d'une très grande richesse, c'est une prière de la foi, aux dimensions universelles. Elle est tout à la fois écoute de la Parole de Dieu, louange et action de grâce, union à Jésus, le Fils, pour apprendre comment prier le Père dans l'Esprit. Cette prière de l'Église fait prier en nous le Christ en faisant de nous, chrétiens, un corps.

-"Pas mal … Intéressant … Continuez, mon ami."

Théophile se mit alors en devoir d'écrire son texte. Ne le dérangeons pas. Il reviendra bientôt pour nous parler du "Notre Père".




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Chers lecteurs, si vous avez des remarques, des observations ou des questions, écrivez-moi à l'adresse jacques.choquet2@orange.fr
À suivre … si vous le voulez bien.

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